Sécheresse, incendies : moins de chasse = moins de casse, M. le Ministre !

Après son appel “La faune a besoin d’eau, pas de fusils !” lancé le 12 août dernier, l’ASPAS enfonce le clou en cette rentrée en s’adressant solennellement à Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, pour lui demander de prendre des mesures fortes en faveur de la faune sauvage mise à très rude épreuve cet été par les incendies, les canicules et le manque d’eau et de nourriture. Réduisez la pression de chasse, laissez respirer la nature ! 

Monsieur le Ministre,

Depuis plusieurs mois déjà, la France fait face à une période de sécheresse historique. Selon Météo France, le mois de juillet 2022 est le mois de juillet le plus sec jamais enregistré et le 2e mois le plus sec depuis le début des mesures en 1958. Tous les départements de France sont sous surveillance, dont 77 en « état de crise ».

Or, les humains ne sont pas les seuls à souffrir du manque d’eau. Les animaux sauvages sont eux aussi particulièrement touchés, comme l’attestent – entre autres – de nombreux témoignages dans les centres de soins.

Vagues de chaleur, manque de nourriture, manque d’eau… La faune sauvage se retrouve très fragilisée. Outre la déshydratation, le manque d’eau conduit à un affaiblissement du système immunitaire qui rend les espèces plus vulnérables face aux risques de maladies infectieuses. Chez les mammifères, par exemple, le lait des femelles n’est pas assez nutritif du fait du manque de nourriture. Le risque de carence des petits est alors élevé et la reproduction des animaux s’en trouve ralentie. De plus, en période de canicule, les animaux dépensent beaucoup d’énergie pour réguler leur température corporelle. Par instinct de survie, de nombreux oisillons ont sauté de leur nid pour échapper à la chaleur, à leurs risques et périls. On constate un effet domino qui va de la microfaune du sol aux plus gros animaux.

Cette période critique a considérablement accru les feux de forêt, qui ont atteint un niveau record en 2022 avec plus de 62 000 hectares incendiés au 20 août, un bilan qui pourrait encore s’aggraver, l’été n’étant pas terminé. De nombreux animaux ont été blessés, tués ou retrouvés en détresse respiratoires. De nombreux écosystèmes ont été durablement anéantis par les flammes, et ils mettront des années à se régénérer.

La chasse ajouterait un stress insupportable à des animaux en état de grande vulnérabilité, trop affaiblis pour fuir.

Malheureusement, ces épisodes sont amenés à se répéter. Le premier volet du 6e rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui porte sur les constats scientifiques, prévoit l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des épisodes de sécheresses dans le monde entier, y compris en France.

La biodiversité est aujourd’hui en crise, à un point tel que la communauté scientifique parle de sixième extinction de masse. D’ailleurs, dans le résumé de son rapport à l’intention des décideurs, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IBPES) explique que l’exploitation directe, et en particulier la surexploitation des animaux (la chasse est expressément citée) est le 2e facteur direct ayant l’incidence relative la plus néfaste sur la nature depuis 1970 (p.12 §B1).

Face à ce constat, il est nécessaire d’agir. Dans ces circonstances, maintenir une pression de chasse de septembre à février, sans compter les nombreuses exceptions qui existent – tirs anticipés dès le 1er juin, période complémentaire de vénerie sous terre dès le 15 mai, chasse prolongée du sanglier jusqu’à fin mars – porte un grave préjudice à toute la faune sauvage. De plus, des herbivores comme les chevreuils sont d’indispensables débroussailleurs naturels, et doivent être maintenus en quantité maximale.

En vertu de l’article L.424-1 du code de l’environnement : « Sans qu’il soit ainsi dérogé au droit de destruction des bêtes fauves édicté à l’article L. 427-9, le ministre chargé de la chasse prend des arrêtés pour : prévenir la destruction ou favoriser le repeuplement des oiseaux ou de toutes espèces de gibier ; reporter la date de broyage de la jachère de tous terrains à usage agricole afin de prévenir la destruction ou de favoriser le repeuplement de toutes les espèces de gibier. »

Aussi, pour permettre aux animaux de résister dans les meilleures conditions possibles aux contraintes sévères qu’ils subissent, nous vous demandons de réduire les dates d’ouverture et de clôture de la chasse, a minima pour la saison 2022-2023, ou de prendre toute mesure propre à réduire la pression de chasse.

Nous vous remercions par avance de l’attention que vous porterez à ce courrier et vous prions d’agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre haute considération.

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