Un chasseur originaire de la Marne a été condamné ce jeudi 4 septembre par la Cour d’appel de Reims pour détention illégale de produits dérivés d’espèces sauvages protégées par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES). IFAW, l’ASPAS et Robin des Bois saluent cette décision.
L’ASPAS (Association pour la protection des animaux sauvages) et l’association Robin des Bois se sont constituées parties civiles dans le cadre d’une affaire de détention d’espèces protégées impliquant un chasseur originaire de la Marne. Le Fonds international pour la protection des animaux (IFAW), dont le siège social se situe à Reims, a souhaité appuyer cette démarche. La présence et le plaidoyer des représentants des parties civiles sont cruciaux pour sensibiliser les tribunaux à la gravité des infractions dans le domaine de la criminalité faunique. IFAW a en effet une grande expertise dans la lutte contre la criminalité faunique depuis de nombreuses années. L’association est également très attachée à sensibiliser le grand public au respect des lois en vigueur concernant les espèces protégées.
Alors qu’une première enquête avait été ouverte pour anomalies de fonctionnement d’un domaine de chasse marnais appartenant à l’accusé, les autorités y ont découvert plusieurs produits dérivés des espèces de l’Annexe A du règlement (CE) n° 338/97 qui, à l’échelle de l’Union Européenne, met en œuvre les dispositions de la CITES* :
– deux pieds d’éléphant transformés en tabouret et deux défenses d’éléphant,
– trois griffes de léopard,
– un autre spécimen de léopard naturalisé,
– des rapaces naturalisés : un Autour des palombes, un Faucon crécerelle, un Busard cendré ainsi qu’une Buse variable.
Le prévenu, poursuivi pour délit de détention sans permis d’importation ou CIC (Certificat intracommunautaire), d’un léopard naturalisé, de griffes de léopard et défenses et pieds d’éléphant chassés dans les années 1980-1990 en Afrique, a tenté de se justifier en déclarant qu’il avait acquis certains de ces trophées légalement, à une époque où les réglementations étaient moins strictes. Mais il n’a pas pu prouver l’origine légale de ces spécimens pourtant protégés ni attester que la détention des rapaces était antérieure à 1981, année qui marque la protection de ces espèces.
Étant gérant d’un domaine de chasse depuis 35 ans et amateur chevronné de chasse aux trophées à l’étranger, il est difficile de croire qu’il pouvait ignorer les obligations légales auxquelles se soumettre pour toute importation et/ou détention de ces espèces et ainsi pour prouver leur origine légale.
Le premier jugement, rendu le 10 juillet 2024 par la Chambre correctionnelle du Tribunal judiciaire de Troyes, l’avait reconnu coupable des délits de détention sans permis d’importation ou dérogation administrative pour l’ensemble des spécimens saisis, à l’exception du léopard naturalisé car il avait produit certains documents que le tribunal avait considérés comme étant des éléments de preuve valables pour l’autorisation de détention. Le prévenu avait été condamné au paiement d’une amende de 8 000 euros dont 4 000 euros en sursis simple et au versement de dommages et intérêts aux associations se portant partie civile, l’ASPAS, la LPO et Robin des Bois, à hauteur de 1 500 euros. Il avait également été condamné à la diffusion du jugement dans le journal marnais l’Union pendant 3 jours, et à la confiscation des animaux ou parties d’animaux naturalisés, à l’exception du léopard naturalisé.
Le prévenu ainsi que le parquet avaient fait appel de cette première décision. Le prévenu n’ayant pas réussi à prouver que ces produits provenaient d’animaux légalement chassés dans leur pays d’origine, la Cour d’appel de Reims a confirmé, ce 4 septembre 2025, le jugement rendu à Troyes le 10 juillet 2024, sauf en ce qui concerne la détention des pieds et défenses d’éléphant, le prévenu ayant produit de nouvelles pièces en appel permettant de prouver, selon le parquet, que l’animal avait été légalement chassé lors d’un safari en 1972 (soit préalablement à la ratification par la France de la Convention CITES en 1978).
La Cour d’appel confirme la condamnation prononcée en première instance, à savoir le paiement d’une amende de 8 000 euros assortie d’un sursis simple de 4 000 euros ainsi que l’allocation de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 475-1 du code de procédure pénale au titre de l’instance d’appel pour les associations s’étant constituées partie civile, mais infirme le jugement s’agissant de la diffusion de la condamnation dans un journal aux frais du condamné, en raison, notamment, de l’ancienneté des faits.
L’ASPAS, IFAW et Robin des Bois, satisfaites de la condamnation dissuasive prononcée en première instance, ne peuvent que se féliciter de cette décision rendue par la Cour d’appel, qui s’inscrit dans la jurisprudence en confirmant le jugement initial en ses dispositions principales.
« Nous saluons la décision de la Cour d’appel de Reims qui met en lumière l’intransigeance des tribunaux envers les délits en lien avec les espèces protégées et illustre les progrès significatifs réalisés ces dernières années dans la lutte contre le trafic d’espèces sauvages en France. Les populations d’innombrables espèces emblématiques, telles que les éléphants, les léopards et les rapaces, se sont effondrées ces dernières décennies. La législation est donc essentielle pour les protéger. IFAW continuera de collaborer avec les autorités pour garantir l’application rigoureuse de ces lois, car sans elles, nous pourrions perdre ces espèces à jamais », commente Mia Crnojevic-Cherrier, Chargée de campagnes chez IFAW.
« A l’heure de la 6e extinction de masse, la chasse aux trophées est une pratique abominable et un business des plus cyniques. En attendant un durcissement des lois internationales pour empêcher les massacres et les trafics d’espèces protégées et menacées, l’ASPAS se satisfait que la justice française prenne autant au sérieux les délits qui entourent ce sinistre loisir et prononce, dans cette affaire en question, des peines aussi significatives », réagit pour sa part Yolaine de la Bigne, porte-parole de l’ASPAS.
* La CITES régit le commerce international d’espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction. Les espèces menacées d’extinction et touchées par le commerce international sont inscrites à l’Annexe I de la Convention, qui leur donne le plus haut niveau de protection. À de très rares exceptions près, le commerce international de ces espèces est interdit. L’Annexe A des règlements CE inclut toutes les espèces inscrites à l’Annexe I de la CITES ainsi que certaines espèces inscrites aux Annexes II et III pour lesquelles l’UE a adopté des mesures internes plus strictes.
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Photo d’en-tête : buse variable © F. Cahez

